Des avis qui diffèrent

Y-a-t-il des vies qui ne valent pas la peine d'être vécues et faut-il y mettre fin ?

Le mardi 18 novembre nous avons assisté à une conférence sur la réflexion en fin de vie. Elle était animée par le professeur Thierry Marmet, spécialiste de la médecine palliative. Les avis, très partagés des différentes associations ou groupes de personnes présents nous ont donné des pistes afin de réaliser un sondage destiné à recueillir l'avis de la population. 

Voici le sondage que nous avons réalisé et auquel 100 personnes ont répondu. L'échantillon étant petit et la question de l'euthanasie étant une question d'ampleur nationale, nous ne pouvons pas tirer de conclusion générale sur la légalisation de l'euthanasie en France. 

          a) Le corps médical


Le serment d'Hippocrate :

Je jure par Apollon médecin, par Asclépios, par Hygie et Panacée, par tous les dieux et toutes les déesses, les prenant à témoin, de remplir, selon ma capacité et mon jugement, ce serment et ce contrat; de considérer d'abord mon maître en cet art à l'égal de mes propres parents; de mettre à sa disposition des subsides et, s'il est dans le besoin, de lui transmettre une part de mes biens; de considérer sa descendance à l'égal de mes frères, et de leur enseigner cet art, s'ils désirent l'apprendre, sans salaire ni contrat; de transmettre, les préceptes, des leçons orales et le reste de l'enseignement à mes fils, à ceux de mon maître, et aux disciples liés par un contrat et un serment, suivant la loi médicale, mais à nul autre.
J'utiliserai le régime pour l'utilité des malades, suivant mon pouvoir et mon jugement; mais si c'est pour leur perte ou pour une injustice à leur égard, je jure d'y faire obstacle. Je ne remettrai à personne une drogue mortelle si on me la demande, ni ne prendrai l'initiative d'une telle suggestion. De même, je ne remettrai pas non plus à une femme un pessaire abortif. C'est dans la pureté et la piété que je passerai ma vie et exercerai mon art. Je n'inciserai pas non plus les malades atteints de lithiase, mais je laisserai cela aux hommes spécialistes de cette intervention. Dans toutes les maisons où je dois entrer, je pénétrerai pour l'utilité des malades, me tenant à l'écart de toute injustice volontaire, de tout acte corrupteur en général, et en particulier des relations amoureuses avec les femmes ou les hommes, libres ou esclaves. Tout ce que je verrai ou entendrai au cours du traitement, ou même en dehors du traitement, concernant la vie des gens, si cela ne doit jamais être répété au-dehors, je le tairai, considérant que de telles choses sont secrètes.
Eh bien donc, si j'exécute ce serment et ne l'enfreins pas, qu'il me soit donné de jouir de ma vie et de mon art, honoré de tous les hommes pour l'éternité. En revanche, si je le viole et que je me parjure, que ce soit le contraire.
Traduction par J. Jouanna, Hippocrate, Paris, Librairie Arthème Fayard, 1992, annexe I.

         Contrairement aux idées reçues, le serment que prêtent les médecins n'est plus le serment d'Hippocrate, et ce depuis bien longtemps. En effet, ce dernier à été remplacé par le serment médical, qui place le patient à une place bien plus importante.
Le serment médical est le suivant : 

« Au moment d'être admis à exercer la médecine, je promets et je jure d'être fidèle aux lois de l'honneur et de la probité.
Mon premier souci sera de rétablir, de préserver ou de promouvoir la santé dans tous ses éléments, physiques et mentaux, individuels et sociaux.
Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans aucune discrimination selon leur état ou leurs convictions. J'interviendrai pour les protéger si elles sont affaiblies, vulnérables ou menacées dans leur intégrité ou leur dignité. Même sous la contrainte, je ne ferai pas usage de mes connaissances contre les lois de l'humanité.
J'informerai les patients des décisions envisagées, de leurs raisons et de leurs conséquences. Je ne tromperai jamais leur confiance et n'exploiterai pas le pouvoir hérité des circonstances pour forcer les consciences.
Je donnerai mes soins à l'indigent et à quiconque me le demandera. Je ne me laisserai pas influencer par la soif du gain ou la recherche de la gloire.
Admis dans l'intimité des personnes, je tairai les secrets qui me seront confiés. Reçu à l'intérieur des maisons, je respecterai les secrets des foyers et ma conduite ne servira pas à corrompre les mœurs.
Je ferai tout pour soulager les souffrances. Je ne prolongerai pas abusivement les agonies. Je ne provoquerai jamais la mort délibérément.
Je préserverai l'indépendance nécessaire à l'accomplissement de ma mission. Je n'entreprendrai rien qui dépasse mes compétences. Je les entretiendrai et les perfectionnerai pour assurer au mieux les services qui me seront demandés.
J'apporterai mon aide à mes confrères ainsi qu'à leurs familles dans l'adversité.
Que les hommes et mes confrères m'accordent leur estime si je suis fidèle à mes promesses ; que je sois déshonoré et méprisé si j'y manque. »

           Le sondage que nous avons réalisé montre une contradiction directe avec les valeurs transmises par le serment médical, en effet on retrouve dans ce dernier : « Je ne provoquerai jamais la mort délibérément. » Cependant, on remarque que 100% des médecins interrogés sont pour la pratique d'une euthanasie sur une personne en état végétatif permanent, ce qui est contraire au serment. Une grande partie également (près de 97%) est pour la pratique d'une euthanasie sur un bébé né grand prématuré ayant de graves séquelles physiques ou psychologiques, ce qui est également contraire au serment. Cependant, on retrouve également dans le serment : « Je ne prolongerai pas abusivement les agonies. » . Autrement dit, le serment médical se porte contre l'acharnement thérapeutique, mais n'accepte pas l'euthanasie.

          b) Les religions



Religion

Avis sur la question d'éthique


Catholicisme
Opposition directe avec l'euthanasie, celle ci est considérée comme un crime. Malgré cela, les soins palliatifs sont acceptés.
Le catholicisme refuse également l'acharnement thérapeutique.



Protestantisme


Les protestants soutiennent un idée différente de celle des catholiques : celle que Dieu n'est pas exclusif dans le fait de disposer du droit à la vie. C'est pourquoi des pays comme les Pays-Bas ou la Suisse, qui sont historiquement protestants, ont donné une sens légal à l'euthanasie active et au suicide assisté


Islam
La seule chose permise est de laisser la personne mourir naturellement ainsi cette culture refuse complètement l'euthanasie mais n'est pas contre le fait de soulager la douleur.

Judaïsme

L'euthanasie active est condamnée. malgré cela, l'euthanasie passive est acceptée.

Bouddhisme

Le bouddhisme considère comme un acte négatif la suppression de la vie.


Croyants-pratiquants



La pratique d’une religion est un facteur susceptible de faire varier la décision quant à la pratique d’une euthanasie. C’est ce que confirment les résultats du sondage puisque on remarque des différences importantes entre le choix des catholiques et celui des islamistes. En effet, alors que 100 % des catholiques sont pour la pratique d’une euthanasie dans le cas d’une personne en état végétatif permanent, seulement 50 % des islamistes sont pour. De même, 100 % des catholiques sont pour une pratique d’euthanasie sur un bébé né prématurément qui subirait de graves séquelles physiques ou psychologiques alors que seulement 50 % des islamistes le sont également. Dans le cas d’une personne en état de conscience minimale, aucun des islamistes n’accepterait une pratique d’euthanasie, alors que plus de 57 % des catholiques y seraient favorables.
Cependant, la religion, que ce soit la religion catholique ou l’islam, refuse catégoriquement toute forme d’euthanasie. Le sondage montre ainsi qu’une personne croyante et pratiquante, n’adhère pas forcément à toutes les idées transmises par la religion qu’elle pratique quand il s’agit d’une pratique d’euthanasie. En sachant ainsi qu’une majorité des catholiques interrogés, n’est pas contre l’euthanasie dans le cadre des cas présentés.


Croyants/non-pratiquants


Si l’on s’intéresse à l’Islam, on constate que le fait de ne pas pratiquer la religion influe sur la décision face à l’euthanasie. Cependant, la religion refuse totalement le fait de pratiquer une euthanasie, ce qui montre une contradiction entre ce que dit la religion et les choix que feraient les islamistes. En effet, 100% des croyants non pratiquants, islamistes, ont répondu favorablement à l’euthanasie en cas d’état végétatif permanent. De même, 83,3 % des croyants islamistes ont répondu favorablement à la pratique d’une euthanasie sur une bébé né prématurément qui subirait de graves séquelles physiques ou psychologiques.
Les catholiques non pratiquants ont également répondu à l’unanimité et de façon favorable à la pratique d’une euthanasie sur une personne en état végétatif permanent.
Les résultats obtenus sont très semblables chez les pratiquants, pour les catholiques.
Cependant, on remarque chez les islamistes que le fait de pratiquer ou non la religion à un impact important sur la décision. En effet, alors que le réponses favorables à l’euthanasie varient entre 33 et 100 % chez les non pratiquants, elles varient seulement entre 0 et 50 % chez les pratiquants. Un changement notable alors que pour les catholiques, le fait de pratiquer ou non la religion n’influent pas réellement le choix.


c) La société


Âge


On voit ici que l’âge influe sur les décisions à prendre, en effet, seulement 32% des moins de 20 ans sont pour la pratique d'une euthanasie sur une personne en état végétatif permanent, alors que plus de 96% des moins de 43 ans (et des plus de 43 ans également) seraient pour ce genre de pratique. Il est également important de noter que peut importe le cas (mis à part le cas d'une personne en état végétatif), le taux de pourcentage pour une pratique d'euthanasie ne dépasse pas 20% pour les moins de 20 ans, alors que pour les personnes d'un âge plus avancé, le taux varie entre 37 et 92% de pour ! L'âge est ainsi un facteur représentatif de l'avis des gens en ce qui concerne l'euthanasie.
Les personnes de moins de 20 ans sont en effets moins aptes à donner leurs accords quant à la pratique de l’euthanasie. Ce phénomène peut s’expliquer par un manque d’information ou un manque d’expérience face à la douleur. Ils sont également moins enclins à prendre une décision de ce type du fait de leur jeune âge.

Sexe



Ici, on remarque que le sexe influe également sur certaines des réponses données. Notamment sur la question 4 qui concerne les naissances prématurées. Les femmes sont en général plus favorable à la pratique de l’euthanasie que les hommes (70% pour les femmes, contre près de 50% pour les hommes). De même dans le cas d'une maladie incurable à un stade avancé, près de 70% des femmes sont pour une pratique d'euthanasie, alors que seulement 48% des hommes y seraient favorables. Cependant, dans la majorité des cas, le choix des femmes est très proche de celui des hommes, on ne peut donc pas en déduire que le sexe est un facteur important quant au choix d'une pratique, ou non, d'euthanasie.

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